Mardi22.6 : Pourquoi Destins, le jeu de la vie, incluait la pauvretĂ©, le suicide et la ruine; Mercredi 23.6 : Les jeux de sociĂ©tĂ© de lâAntiquitĂ©; Jeudi 24.6 : Le seul jeu de sociĂ©tĂ© qui dure 1â500 heures; Vendredi 25.6 : La chirurgie bruyante et brillante inspirĂ©e du jeu Docteur Maboul; Samedi 26.6 : Le jeu de sociĂ©tĂ© des Alpha Nerds
Un jeu ancien et trĂšs populaire pour la simplicitĂ© de sa rĂšgle. Destins ou Destins - le Jeu de la vie est un des jeux les plus connus de la gamme MB. Afin de reprĂ©senter le processus, les cellules vivantes sont gĂ©nĂ©ralement reprĂ©sentĂ©es colorĂ©es sur la grille, sur un fond de cellules mortes incolores. Les mathusalems sont des structures actives qui mettent un certain temps avant de se stabiliser. Pour la petite anecdote, Destins est un jeu qui date de 1861 dont le nom anglais original est âThe Checkered Game of Lifeâ, celui-ci a Ă©tĂ© remis au goĂ»t du jour par MB Ă lâoccasion de son centenaire pour connaĂźtre sa forme actuelle. la page correspondante sur Wikipedia pour plus d'infos. jaune cellules ne vivant quâune seule gĂ©nĂ©ration, des vaisseaux de type transversal ou orthogonaux, câest-Ă -dire, des vaisseaux ayant un dĂ©placement oblique, c'est-Ă -dire, La croissance dâune configuration est au maximum en. Le jeu fait appel Ă votre mĂ©moire mais aussi Ă votre sens de l'observation. DĂ©tails sur la dynamique du rĂ©seau ce U » de 7 cellules Ă©galement appelĂ© heptomino pi Ă©volue vers une structure complexe et organique » en passant par des formes trĂšs esthĂ©tiques. LE JEU DE LA VIE DE CONWAY, les cellules Ă©voluent sur une grille en sui-vant la rĂšgle naissance si 3 voisins, sur-vie si deux ou trois voisins. Mon but est d'avoir une activitĂ© ludique avec mes gamins, avec au final un jeu auquel on pourra jouer J'ai commencĂ© Ă faire les cases du jeu. CENDRES, CONFIGURATIONS STABLES, ABSORBEURS. si une cellule a exactement deux voisines vivantes, elle reste dans son Ă©tat actuel Ă lâĂ©tape suivante. Ils ont permis de crĂ©er des configurations Ă©normes et trĂšs ingĂ©nieuses et de suivre leur Ă©volution, insufflant une nouvelle dynamique dans lâĂ©tude dĂ©jĂ trĂšs riche de cet automate cellulaire. âą Inclut un plateau de jeu avec roulette, 100 cartes, 5 jetons Tourne pour gagner, 4 voitures, 24 chevilles de personne, 12 chevilles d'animal, un paquet d'argent et un guide du jeu. Un jardin dâĂden est une configuration sans passĂ© possible aucune configuration ne donne Ă lâĂ©tape suivante un jardin dâĂden. Dans Destins, les joueurs font tourner la roue du destin et empruntent le chemin sinueux de la vie. Le jeu de la vie jdlv ou game of life se reprĂ©sente sur une grille 2D de taille thĂ©oriquement infinie composĂ©e de cases carrĂ©es appelĂ©es cellules qui ont un Ă©tat binaire 1 pour vivante et 0 pour morte.. Les carrĂ©s bleus indiquent que la cellule est encore en vie, les verts qu'elle est morte. RĂšgle du Destin The Game of life - RĂšgle du jeu Lif . A votre tour, vous allez regarder 2 cartes secrĂštement et ensuite dĂ©placer n'importe quelle carte pour la ⊠Le film s'ouvre sur une citation du Mariage de Figaro7 de Beaumarchais Produit en 1939, alors que la guerre semble inĂ©luctable, le fil⊠Cependant, Nehaniv a montrĂ© que tout comportement synchrone peut ĂȘtre Ă©mulĂ© par des automates cellulaires asynchrones et il est donc possible de retrouver le comportement du jeu de la vie sans horloge globale » cadençant l'Ă©volution des gĂ©nĂ©rations[12],[13]. Ce jeu peut ĂȘtre compĂ©titif, c'est la rĂšgle qui a dominĂ© ces derniers siĂšcles, ou coopĂ©ratif, une rĂšgle qui prend de plus en plus d'ampleur ces derniĂšres annĂ©es. Une confi- La rĂšgle du jeu est un film rĂ©alisĂ© par Jean Renoir avec Roland Toutain, Nora Gregor. S nombre actuel de cellules vivantes dans son voisinage entier naturel compris entre 0 et 8 inclus ; E Ă©tat actuel de la cellule entier naturel Ă©gal Ă 0 pour une cellule morte et Ă©gal Ă 1 pour une cellule vivante. Au dĂ©but du jeu, tu peux choisir entre avoir une carriĂšre tout de suite tu pioches une carte et ça te donne ton mĂ©tier ou alors tu pars sur le parcours universitaire. Il existe des variantes du jeu de la vie, fondĂ©es sur des rĂšgles de voisinage lĂ©gĂšrement diffĂ©rentes, par exemple HighLife ou Day & night. une cellule morte possĂ©dant exactement trois voisines vivantes devient vivante elle naĂźt ; une cellule vivante possĂ©dant deux ou trois voisines vivantes le reste, sinon elle meurt. Nous bien sĂ»r ! Comme d'habitude, des petits morceaux de plastique parsĂšment le plan de jeu. Tric Trac c'est 40 000 membres, 18 000 jeux de sociĂ©tĂ© rĂ©fĂ©rencĂ©s, 160 000 avis de joueurs, 1 800 vidĂ©os d'explications et de parties... 21 ans de partage autour du jeu de sociĂ©tĂ© . Le jeu de la vie est un automate cellulaire imaginĂ© par John Horton Conway en 1970 et qui est probablement le plus connu de tous les automates cellulaires. Ă chaque Ă©tape, lâĂ©volution dâune cellule est entiĂšrement dĂ©terminĂ©e par lâĂ©tat de ses huit voisines de la façon suivante Ainsi, la configuration donne au tour suivant la configuration qui redonne ensuite la premiĂšre. Please enable Cookies and reload the page. De telles structures peuvent ĂȘtre créées Ă partir de puffeurs que lâon modifie afin que les dĂ©bris sâagencent sous forme de navires. Ton but dĂ©poser les cellules sur la grille pour les faire intĂ©ragir entre elles et recrĂ©er la vie. A votre tour, vous allez regarder 2 cartes secrĂštement et ensuite dĂ©placer n'importe quelle carte pour la ⊠Depuis 2008, de nombreux programmes dont le plus connu est Golly[14] intĂšgrent cet algorithme dans une interface graphique. If you are at an office or shared network, you can ask the network administrator to run a scan across the network looking for misconfigured or infected devices. âą Il faisait appel Ă une table de hachage pour mĂ©moriser et retrouver rapidement des configurations locales. C'est d'ailleurs le premier vaisseau Ă se dĂ©placer obliquement, c'est-Ă -dire ni orthogonalement, ni diagonalement. L'invention du Jeu de la vie est le rĂ©sultat d'une tentative fructueuse de simplification de l'automate de Von Neumann RĂšgle du jeu Destin Destin The Game of life est un jeu de sociĂ©tĂ© de hasard et de stratĂ©gie auquel on peut jouer avec des enfants Ă partir de 11 ans. If you are on a personal connection, like at home, you can run an anti-virus scan on your device to make sure it is not infected with malware. Some of his roles were Octave in La RĂšgle du jeu, Cabuche in La BĂȘte humaine, and PĂšre Poulain in Une partie de 1975, Renoir received an honorary Academy Award as âA genius who, with grace, responsibility and enviable devotion Variante Cacher dans le centre les papiers sur lesquels sont inscrites les rĂšgles de vie. Cette variante comporte deux types de cellules, les positives » et les nĂ©gatives », chacune rĂ©pondant aux mĂȘmes rĂšgles, Ă la diffĂ©rence du signe. Wade en 2010[4]. Qui dĂ©cide des rĂšgles du jeu ? C. L. Nehaniv, Evolution in Asynchronous Cellular Automata ». La question qui nous occupe est quelles rĂšgles, quelles limites donner Ă lâenfant en lien avec son dĂ©veloppement. rĂ©ponses. si une cellule a strictement moins de deux ou strictement plus de trois voisines vivantes, elle est morte Ă lâĂ©tape suivante. Ce drame gai » ou fantaisie dramatiquenote 1 », pour reprendre l'expression du rĂ©alisateur, a pour ambition d'ĂȘtre une peinture de mĆurs de l'aristocratie et de la grande bourgeoisie ainsi que des domestiques qui les servent, Ă la fin des annĂ©es 1930. Description MatĂ©riel Galerie L'avis de Bibliojeu L'avis des joueurs Smile life, la rĂšgle du jeu expliquĂ©e. En rĂ©sumĂ© â tout provient du Tao, le plein/vide origine de la vie du mouvement â ce qui est yin devient yang 0 va vers 1 â ce qui est yang devient yin 1 va vers 0 Gardner Ă©crivait dans ses colonnes que le jeu de la vie rendit Conway rapidement cĂ©lĂšbre mais il ouvrit aussi un nouveau champ de recherche mathĂ©matique, celui des automates cellulaires. Ce dernier essayait de trouver une hypothĂ©tique machine qui pourrait sâauto-reproduire. Vous obtenez Destin - Le Jeu de la vie - version Ă©lectronique, un jeu vieux de plus d'un siĂšcle avec une modification curieuse les billets de banque sont remplacĂ©s par un appareil Ă©lectronique.. Mon but est d'avoir une activitĂ© ludique avec mes gamins, avec au final un jeu auquel on pourra jouer J'ai commencĂ© Ă faire les cases du jeu. La rĂšgle est claire, facile Ă expliquer, vite apprise. Cloudflare Ray ID 62fe9f9ffb96ed57 âą DâaprĂšs Gardner, Conway expĂ©rimenta plusieurs jeux de rĂšgles concernant la naissance, la mort et la survie dâune cellule avant dâen choisir un oĂč la population des cellules nâexplose pas ce qui arrive souvent lorsque les conditions de naissances sont moins strictes mais oĂč des structures intĂ©ressantes apparaissent cependant facilement. Bien que n'Ă©tant pas dĂ©crit par la thĂ©orie des jeux, certains le dĂ©crivent comme un jeu Ă zĂ©ro joueur ». Ces possibilitĂ©s augmentĂšrent lâintĂ©rĂȘt pour le jeu de la vie. Bienvenue dans "Le Jeu de la Vie" un super jeu zĂ©ro joueur dans lequel tout est question d'observation et de crĂ©ation. Puis le rĂ©seau se stabilise sur une forme stable oscillante complexe[8]. You may need to download version now from the Chrome Web Store. le clown est formĂ© Ă lâenvers. Jean-Claude Perez, DE NOUVELLES VOIES VERS LâINTELLIGENCE ARTIFICIELLE pluri-disciplinaritĂ©, auto-organisation et rĂ©seaux neuronaux », 1988, Ăd. Câest aussi potentiellement douloureux pour soi comme pour ses proches. Le "Jeu de la Vie", conçu par le mathĂ©maticien John Horton Conway en 1970, correspondant Ă une simulation algorithmique d'une population de cellules "vivantes" reprĂ©sentĂ©es comme les cases d'une matrice cf. Conway Ă©tait Ă©galement intĂ©ressĂ© par un problĂšme prĂ©sentĂ© vers les annĂ©es 1940 par un mathĂ©maticien renommĂ© John von Neumann. J. H. Conway sâintĂ©ressait Ă un problĂšme proposĂ© par le mathĂ©maticien John Leech dans le domaine de la thĂ©orie des groupes et qui avait trait Ă lâempilement dense de sphĂšres Ă 24 dimensions connu comme le rĂ©seau de Leech. Il sâagit dâun automate cellulaire, un modĂšle oĂč chaque Ă©tat conduit mĂ©caniquement Ă lâĂ©tat suivant Ă partir de rĂšgles prĂ©-Ă©tablies. Le jeu de la vie The Game of Life, inventĂ© en 1970 par John Conway, prĂ©sentĂ© par Martin Gardner, n'est pas rĂ©ellement un jeu, c'est un automate cellulaire sur ZxZ reprĂ©sentĂ© par un quadrillage du plan damier dont les cases cellules sont soit blanches mortes soit noires vivantes. Des variantes existent oĂč sa vitesse et sa pĂ©riode sont diffĂ©rentes. 2. Ă lâitĂ©ration 110 on obtient cette image de clown ». Performance & security by Cloudflare, Please complete the security check to access. Pour mâamuser, jâessaie ce soir de retranscrire en rĂšgle du jeu de la vie les principes fondateurs du Taoisme. De plus, la structure est auto-reproductible avec un dĂ©phasage, la nouvelle structure fille itĂ©ration 45 interfĂ©rant avec une version de la structure mĂšre itĂ©ration 15 en cours dâĂ©volution. Regle jeu destin j ai trouve ca DESTINS. Actuel Jeu sociĂ©tĂ© Life le jeu de la vie Destin Jeu sociĂ©tĂ© Life le jeu de la vie Destin 12 . Le but n'Ă©tant pas de spolier Hasbro et d'obtenir Ă moindre frais un jeu de sociĂ©tĂ©. Plusieurs programmes informatiques simulent le jeu de la vie; dont Mirek's Cellebration[10]. Prenez d'une part l'un des tous premiers jeux de sociĂ©tĂ©, d'autre part une Ă©quipe marketing. Le tout est trĂšs bien illustrĂ© et nous plonge dans un univers japonais. Les canons, ou lanceurs, ou encore lances-navires en anglais guns sont en quelque sorte des oscillateurs lĂąchant des dĂ©bris, capables de produire des vaisseaux, Ă un rythme variable toutes les 15, 23, 30 ou 360 gĂ©nĂ©rations par exemple, ou bien de maniĂšre apparemment imprĂ©visible pour les lance-navires pseudo-alĂ©atoires[prĂ©cision nĂ©cessaire]. Le tout est trĂšs bien illustrĂ© et nous plonge dans un univers japonais. Ce glisseur» cases vertes est une configuration de cinq cellules qui se dĂ©place d'une case en diagonale en quatre gĂ©nĂ©rations. Destins le jeu de la vie ne date pas dâhier puisque son origine vient du 19Ăšme siĂšcle, de 1861 prĂ©cisĂ©ment, inventĂ© par lâentrepreneur Milton Bradley qui le nomma The Checkered Game of Life » en français Le Damier Jeu de la Vie. 1926, and Une vie sans joie 1924 Backbiters, Catherine.He occasionally stepped in front of the camera. ReÌgle Nâą1 le jeu câest la vie. Bienvenue dans "Le Jeu de la Vie" un super jeu zĂ©ro joueur dans lequel tout est question d'observation et de crĂ©ation. L'Ă©volution des cellules suit des rĂšgles simples dĂ©crites dans le tableau ci-dessous. Ce nouvel algorithme faisait donc tourner » diffĂ©rentes portions de lâespace Ă des vitesses diffĂ©rentes et parvenait Ă prĂ©server la cohĂ©rence aux bordures de chaque rĂ©gion ainsi simulĂ©e. Petite Rouge Pdf, Fleuve Arno Florence, Boutique Feeling Belfort, Spqr Histoire De L'ancienne Rome Pdf, Zou En Vacances, Chez Moi - TraducciĂłn, World Famous Nutritionist, 0 0 vote Ăvaluation de l'article Partagez sur vos rĂ©seaux sociaux
BonjourĂ tous ! Je viens d'acheter le jeu Destins dans un vide grenier (version 1997) mais point de rĂšgle Ă l'intĂ©rieur ! Quelqu'un aurait il la gentillesse de m'indiquer oĂč je peux la trouver ?
Le Film français Peu de films ont suscitĂ© autant de rĂ©actions diverses et variables, hĂ©sitantes ou catĂ©goriques, si souvent contradictoires â Ă lâimage peut-ĂȘtre dâune Ćuvre riche Ă lâexcĂšs â quâon est tentĂ© de donner sa langue au chat. Mais que La RĂšgle du jeu, restaurĂ©e par des mains pieuses en 1959 sortit dâun purgatoire de vingt-cinq ans pour accĂ©der au ciel des classiques, il est temps dâoublier les caprices de la mode, la paresse de tous les conformismes et la faiblesse des passions les plus sincĂšres, pour examiner sereinement lâouvrage Ă la lumiĂšre dâinformations complĂštes, le saisir dâun coup dâĆil dans sa premiĂšre nouveautĂ© grĂące au recul propice, le juger enfin avec tous les Ă©gards quâon doit Ă la vraie jeunesse. [Philippe Esnault â LâAvant-ScĂšne CinĂ©ma, n°52 â octobre 1965] Il est admis dĂ©sormais quâaprĂšs huit annĂ©es de labeur magnifique et de luttes incessantes, jalonnĂ©es depuis La Chienne 1931 par des Ă©checs et des succĂšs Ă©galement Ă©clatants, La RĂšgle du Jeu situe le faĂźte de lâascension de Jean Renoir ; quâelle marque lâaboutissement dâune vie et le dĂ©part dâune Ă©volution profonde ; quâelle fait charniĂšre, par ses formules dâexpression, entre le cinĂ©ma dâavant-guerre et celui dâaujourdâhui. Un tel rĂ©sultat doit beaucoup Ă des circonstances exceptionnelles, finalement trĂšs favorables au projet. Renoir a quarante-quatre ans, lâĂąge de la maturitĂ©. II a dĂ©couvert la confiance en soi, perdu sa hantise dâĂȘtre un ratĂ©, dĂ©pouillĂ© le vieil Octave comme une peau dâours. Il pense avoir son mot Ă dire », maintenant que lâexpĂ©rience lâa rĂ©vĂ©lĂ© Ă lui-mĂȘme et aux autres. Car il a besoin quâon lâencourage, quâon lâaime et quâon lâaide. Depuis toujours, le bonhomme sait conquĂ©rir les cĆurs par son charme pataud de Parigot matois, les Ă©lans contradictoires dâune nature gourmande, son style savoureux de bohĂšme trop fainĂ©ant pour exploiter ses dons, frottĂ© de culture vraie mais nourri par ses sens, Ă lâaise au salon comme Ă lâoffice. Ses films lâont rendu cĂ©lĂšbre ; ses idĂ©es, populaire. Le contact avec le public, La Grande Illusion, puis La Marseillaise, le lui ont rĂ©ellement donnĂ©. Dans lâimagerie du moment, lâenfant gracile peint par son pĂšre, lâancien officier de 14, le cĂ©ramiste et le mondain sont devenus ce gros garçon qui lĂšve le poing dans les meetings » et qui sâattable au bistrot avec les copains devant un litre de beaujolais pour dĂ©guster du fromage de Brie. Sa silhouette fleure le terroir et le folklore. Les recettes de La BĂȘte humaine, son film prĂ©cĂ©dent, ont confirmĂ© sa valeur commerciale. Les producteurs et les distributeurs sont enfin prĂȘts Ă lui faire confiance. Les techniciens ne le considĂšrent plus comme un amateur certes douĂ©, mais brouillon il a trouvĂ© leur estime en prouvant quâil connaĂźt son mĂ©tier, sâil se moque des rĂšgles. Enfin, les critiques de bonne foi reconnaissent en lui, depuis le dĂ©part de RenĂ© Clair, le grand cinĂ©aste français de lâĂ©poque. Cette rĂ©ussite tardive et prometteuse ne le prend pas au dĂ©pourvu. Pendant des annĂ©es, ce touche-Ă -tout a fait connaissance avec le monde, les autres et lui-mĂȘme ; la frĂ©quentation des Ćuvres et la pratique de son art lui ont appris la joie de crĂ©er et sa maniĂšre personnelle de le faire. LibĂ©rĂ© des peurs et des contraintes, il possĂšde cette fois les moyens de son ambition. Tout cela est encore confus et le hasard semblera mener la partie qui dĂ©bute comme une belote et sâachĂšve en coup de poker. Mais Renoir nâaura pas trichĂ©, tout Ă©tonnĂ© quâil est dâavoir misĂ© si gros jeu dans une conjoncture incertaine. [Philippe Esnault â LâAvant-ScĂšne CinĂ©ma, n°52 â octobre 1965] Lâorage gronde. Entrepris au lendemain de Munich, le film sera prĂ©sentĂ© neuf semaines avant la dĂ©claration de la guerre. La mobilisation partielle du 16 mars a dĂ©garni les rangs du personnel ouvrier. Dans une atmosphĂšre de malaise et de nervositĂ©, on feint de continuer Ă vivre, mais le cĆur nây est plus. Il est sans doute facile, aprĂšs coup, de trouver Ă lâĆuvre des accents prophĂ©tiques, mais elle est manifestement imprĂ©gnĂ©e du climat dĂ©bilitant de cette pĂ©riode câest moins lâoraison funĂšbre dâune classe dĂ©cadente quâon entend prononcer que sonner le glas des illusions. On danse sur un volcan. VoilĂ bien lâoccasion de concevoir un drame gai ». Renoir veut avoir les mains libres. Il fonde avec quatre amis Camille François, son frĂšre Claude, AndrĂ© Zwobada et Olivier Billiou, une Ă faible capital, La Nouvelle Edition Française », qui doit non seulement produire et diffuser les films de Jean Renoir , mais coopĂ©rer plus tard avec RenĂ© Clair, Julien Duvivier, Jean Gabin et Simone Simon⊠On prĂ©voit de tourner deux films par an. Cette tentative est donc dĂ©jĂ fort intĂ©ressante puisquâelle vise, sur le modĂšle des Artistes AssociĂ©s » dâautrefois, Ă lâĂ©mancipation financiĂšre des crĂ©ateurs. Le gouvernement français vit dâun trĂšs bon Ćil cette initiative et songea mĂȘme, dit-on, Ă confier Ă lâĂ©quipe la gestion dâun des plus grands circuits nationaux, alors en grave difficultĂ©. Cependant, certains commerçants du cinĂ©ma, sentant la menace, firent grise mine et lâon cherche ici parfois lâorigine de la cabale qui fit Ă©chouer le film et lâentreprise ; hypothĂšse hasardeuse, car lâĂ©chec de La RĂšgle du jeu fut total auprĂšs du public populaire comme auprĂšs des snobs. Les coopĂ©rateurs se mettent au travail, chacun Ă sa tĂąche. InstallĂ©s dans les bureaux louĂ©s, 18, rue de la Grange-BateliĂšre, Ă Marcel Pagnol, Camille François, Claude Renoir et Billiou prospectent les capitaux, tandis que Jean sâenferme dans la propriĂ©tĂ© familiale de Marlotte, en compagnie de Karl Koch et dâAndrĂ© Zwobada, pour travailler au scĂ©nario. Son point de dĂ©part ? Une transposition moderne, assez libre, de la piĂšce de Musset quâil prĂ©fĂšre Les Caprices de Marianne. Il lâavait apportĂ©e en dot Ă la et dĂ©posĂ©e sous forme dâun synopsis de quelques feuillets dactylographiĂ©s Ă la SociĂ©tĂ© des Auteurs Comme on sâinspire toujours de quelque chose il faut tout de mĂȘme partir dâun point, mĂȘme sâil ne reste rien de ce point dans lâĆuvre dĂ©finitive pour mâaider Ă penser Ă La RĂšgle du jeu, jâai relu assez attentivement Marivaux et Musset, sans avoir lâidĂ©e dâen suivre mĂȘme lâesprit. Je pense que ces lectures mâont aidĂ© Ă Ă©tablir un style, Ă cheval sur un certain rĂ©alisme â pas extĂ©rieur, mais rĂ©alisme tout de mĂȘme â et une certaine poĂ©sie ; tout au moins, jâai essayĂ©. » En fait, Renoir cristallise autour de ce thĂšme. Quelques semaines plus tard, il rentre de Marlotte, sĂ»r de son propos, avec un dossier sous le bras qui contient le premier dĂ©coupage de la partie parisienne et la trame gĂ©nĂ©rale des Ă©vĂ©nements de La ColiniĂšre. En son absence, Camille François et Olivier Billiou ont fait du bon travail le premier en dĂ©cidant des proches Ă fournir de lâargent, le second en obtenant des avances sur des contrats de vente Ă lâĂ©tranger, la se rĂ©servant le marchĂ© national. On envisage un budget de francs, considĂ©rable pour lâĂ©poque. La RĂšgle du jeu sâannonce comme la grande production française de lâannĂ©e 1939. Le choix des interprĂštes va modifier profondĂ©ment le sujet et le destin du film, Ă trois semaines du tournage. Renoir pensait donner le rĂŽle de Christine Ă Simone Simon, la femme-enfant, qui retrouverait son mari de La BĂȘte humaine, Fernand Ledoux. La jeune star », rentrant dâHollywood, exigea huit cent mille francs de cachet, ce qui la fit Ă©carter par Camille François qui proposa une dĂ©butante de talent MichĂšle Alfa, quâon alla voir en scĂšne. Mais Renoir nâeut dâyeux ce soir-lĂ que pour la princesse Starhemberg, une ancienne actrice, quâil finit par dĂ©cider. Sa toquade mondaine provoqua la stupeur Nora CrĂ©gor nâĂ©tait plus une gamine capricieuse, fraĂźche Ă©pousĂ©e par un gros homme un peu ridicule, mais une femme du monde dans lâĂ©clat de la trentaine. On lui donna pour mari lâexcellent Marcel Dalio, dont il fallut aussi modifier la biographie. EnivrĂ©, dâautre part, par lâactrice et le personnage, Jean Renoir dĂ©cidait de jouer le rĂŽle dâOctave, dâabord attribuĂ© Ă son frĂšre Pierre. DĂšs lors, le projet prenait une autre direction, ou plutĂŽt une dimension nouvelle. Lâennui, câest que le cinĂ©aste, en dĂ©pit de sa passion pour la comĂ©die, restait un amateur et que la charmante Nora GrĂ©gor Ă©corchait le français. [Philippe Esnault â LâAvant-ScĂšne CinĂ©ma, n°52 â octobre 1965] La distribution habilement complĂ©tĂ©e, une Ă©quipe nombreuse, fervente et qualifiĂ©e, pourvue dâun excellent matĂ©riel objectifs Kinoptik, Ă©quipement sonore Western Electric prit le chemin de la Sologne, jâallais dire le chemin des vacances. Tourner avec Renoir, câest sâamuser prodigieusement en bande, dans une atmosphĂšre de rĂ©crĂ©ation. On travaille pour le plaisir, en vrais amateurs, et le film garde la saveur de la vie. On improvise et chacun donne son idĂ©e, sous le regard des financiers et des techniciens. SĂ©duit par le paysage et les rĂšgles de la vĂ©nerie, Renoir dĂ©veloppe la partie de chasse qui sera dirigĂ©e par un vieil Anglais et lâami Corteggiani, un parfait fusil. On enrĂŽle les amis et connaissances pour figurer dans le film, oĂč les blagues sâincorporent. Puis les acteurs interviennent Les acteurs sont aussi les auteurs dâun film et, quand on se trouve en leur prĂ©sence, ils apportent des rĂ©actions que lâon nâavait pas prĂ©vues; ces rĂ©actions sont souvent trĂšs bonnes et on serait bien fou de ne pas en profiter. J. R. » Les jeux de scĂšne, les dialogues et finalement la psychologie des personnages et mĂȘme le sens de lâĆuvre se trouvent ainsi modifiĂ©s et enrichis. Mais le temps nâavait pas tardĂ© Ă se gĂąter. Pour ces scĂšnes dâextĂ©rieur, la pluie tombe sans arrĂȘt et lâon attend des jours entiers lâĂ©claircie, la bonne lumiĂšre pour les prises et les raccords. Le cinĂ©aste peut encore travailler son scĂ©nario Ă lâauberge de Salbris durant une quinzaine. Sans cesse remaniĂ©, le projet ne prend sa tournure dĂ©finitive quâau moment du tournage. Renoir reste lâhomme de lâimprovisation dâaprĂšs canevas, du travail sur le vivant Jâai une certaine tendance Ă ĂȘtre un peu thĂ©orique dans le dĂ©but de mes travaux ce que je voudrais dire, je le dis un peu trop clairement, un peu comme un confĂ©rencier, et câest extrĂȘmement ennuyeux. Peu Ă peu et le contact avec les acteurs mây aide Ă©normĂ©ment, jâessaie de mâapprocher de la maniĂšre dont, dans la vie rĂ©elle, des personnages pourraient sâintĂ©grer Ă leurs thĂ©ories, tout en restant soumis aux mille impedimenta de la vie, aux mille petits Ă©vĂ©nements, aux mille petits sentiments qui font que lâon ne reste pas thĂ©orique .. » De cette mĂ©thode de cinĂ©ma en libertĂ©, qui lâoppose Ă son ami RenĂ© Clair, on sait les avantages et les inconvĂ©nients. Lâinvention spontanĂ©e se paie par des retards et des dĂ©penses supplĂ©mentaires. On peut craindre Ă lâarrivĂ©e de fĂącheuses surprises ratages et coupures inĂ©vitables, incohĂ©rences de dĂ©tail et mĂȘme dĂ©sĂ©quilibre. On sâinquiĂšte bientĂŽt, car le devis initial sera dĂ©passĂ©. Heureusement, Zwo », quâon dĂ©pĂȘche Ă Paris, parvient Ă convaincre Jean Jay, directeur chez Gaumont, qui venait de distribuer avec succĂšs La BĂȘte humaine, de programmer la future RĂšgle du jeu dans son circuit contre un Ă -valoir » dâenviron deux millions. Gros sacrifice pour un film sans vedettes et passablement original. Jean Jay, qui croit en Renoir, mais qui doit dĂ©fendre les intĂ©rĂȘts de ses actionnaires, se rend en Sologne et persuade le rĂ©alisateur, avec lâappui de Camille François, inquiet lui aussi des dĂ©passements, dâaller occuper au plus tĂŽt le grand plateau FG de PathĂ©, Ă Joinville, oĂč le vaste complexe » construit par LouriĂ© et Douy nâattend plus que lui. Une petite Ă©quipe composĂ©e de Zwobada, Corteggiani et Jacques Lemare restera sur place pour filmer les plans de tuerie dâanimaux, dâaprĂšs les indications prĂ©cises de Renoir, auquel on projette les rushes chaque samedi. Il faudra patienter deux mois, construire une sorte de casemate mobile et descendre des centaines de lapins pour obtenir lâeffet recherchĂ©, rĂ©ellement bouleversant. Sur le plateau double de Joinville, oĂč Jean Renoir arpente lâexact et riche dĂ©cor quâil lui fallait, la tension monte. Les bruits de guerre franchissent les portes du studio, les rapports de lâĂ©quipe Ă©voluent, le tournage prend la forme dâune aventure. Retrouvant son goĂ»t du peuple, Renoir dĂ©veloppe lâintrigue du trio Lisette-Schumacher-Marceau, servi par de magnifiques interprĂštes, et donne aux domestiques une importance Ă©gale Ă celle des maĂźtres. Cependant quâil tĂąche dâescamoter la gentille et mĂ©diocre Nora, qui ne le fascine plus. Le patron regrette dâautant plus amĂšrement son caprice quâil est emballĂ©, Ă juste titre, par la classe de Mila ParĂ©ly, cette amazone de vingt-deux ans, quâon verrait bien dans la peau de Christine. Il Ă©toffera donc le personnage de lâintelligente et sensuelle GeneviĂšve, mineur Ă lâorigine. Jean Jay surveille la marche du travail et voit les rushes », Le dessin gĂ©nĂ©ral du film lâintĂ©resse, en dĂ©pit de son ton dĂ©routant, mais il est atterrĂ© par le jeu de Renoir dans le rĂŽle dâOctave. Il sâen ouvre Ă lui franchement et lui conseille de le rĂ©duire puisquâil nâest plus possible de tout recommencer avec Michel Simon, comme le suggĂšre Jean Renoir. Le rĂ©alisateur ne suivra pas ce conseil. Par le truchement dâOctave, il entre et circule dans son film, sây rĂ©vĂšle et sây confesse. Octave tient dans les derniĂšres scĂšnes quand il a dĂ©vĂȘtu sa peau dâours une place dĂ©terminante au point de ralentir lâaction, de la compliquer, de la rendre inacceptable au public habituel. Mais il est Ă©branlĂ©, sâinterrogeant sans doute sur le rĂ©sultat final et lâaccueil des spectateurs. Il sait quâil ne pourra sâen prendre quâĂ lui dâune Ă©ventuelle dĂ©ception. Merveilleusement entourĂ© par une Ă©quipe talentueuse et dĂ©vouĂ©e, il a pu pendant des mois Ćuvrer en totale libertĂ©, sans restriction technique ou financiĂšre. Il a obtenu des meubles de prix, de lâargenterie de chez Christofle, des piĂšces de collection comme ce limonaire gĂ©ant quâon a fait venir dâAllemagne; le tout installĂ© dans le luxueux dĂ©cor aux portes pleines, aux vrais parquets, Ă lâescalier monumental de Lourié⊠Il aura coĂ»tĂ© plus de cinq millions, ce curieux film oĂč il sâest finalement mis tout entier, son dĂ©mon intĂ©rieur se jouant des Ă©vĂ©nements, et qui le surprend peut-ĂȘtre lui-mĂȘme. Lâartiste est dĂ©passĂ© par sa crĂ©ation. Il tourne Ă tout hasard une ou deux scĂšnes explicatives et tĂątonne pour la fin le dĂ©part dâOctave en compagnie de Marceau prĂ©cĂ©dant aujourdâhui comme une fausse sortie la remarquable scĂšne du perron. Partageant sans doute secrĂštement lâinquiĂ©tude de ses amis, rompu dâautre part par lâeffort quâil vient de fournir, Jean Renoir va sâisoler, laissant Ă Marguerite, sa plus prĂ©cieuse collaboratrice, le soin de tirer de mĂštres de pellicule le film dont il a rĂȘvĂ©. DĂ©but juillet, on assiste en groupe Ă la premiĂšre projection de La RĂšgle du jeu, qui dure 113 minutes. Jeau Jay exige des coupures pour Ă©viter lâĂ©chec commercial. Renoir capitule. Sur ses indications, Marguerite ramĂšne le film Ă une durĂ©e de 100 minutes, obtenue par lâablation de sept scĂšnes. La censure donne son visa. Vendredi 7 juillet 1939 grande premiĂšre au ColisĂ©e », mais Ă bureaux ouverts. Un interminable documentaire pompier Ă la gloire de lâEmpire ouvre la sĂ©ance. AprĂšs Lâentracte, le chahut commence et tourne Ă lâĂ©meute. Des spectateurs de lâorchestre allument des journaux ; on ricane, on conspue. A la sortie, parmi quelques gentillesses, un monsieur bien propose de fusiller les gens qui font de tels films. A lâAubert-Palace, le public, plus populaire, nâest pas choquĂ©, mais il nây comprend goutte et les quolibets pleuvent. Câest la dĂ©route Renoir charge Marguerite dâassister aux sĂ©ances pour repĂ©rer les passages les plus sifflĂ©s. Au bout de cinq jours, le film se trouve ramenĂ© Ă 90 minutes. Et, pour les salles qui programment deux films par sĂ©ance, on Ă©tablit, Ă la demande de Gaumont, une autre version rĂ©duite Ă 85 minutes. Mais on ne taille pas dans un tel film, fĂ»t-ce pour le simplifier. Il quitte lâaffiche en trois semaines. Enfin, pour Ă©pargner tout nouvel effort aux naufragĂ©s, la censure interdit, en octobre, comme dĂ©moralisante », La RĂšgle du jeu. A la sortie du ColisĂ©e, RenĂ© Clair ramenait en taxi son ami, fort abattu Enfin, mon vieux Jean, quâest-ce que tu as voulu faire exactement? â Je ne sais pas, je ne sais plus ! » [Philippe Esnault â LâAvant-ScĂšne CinĂ©ma, n°52 â octobre 1965] Les intentions de Renoir paraissent aujourdâhui fort claires. Loin dâĂȘtre une farce confuse bĂąclĂ©e par un soviet hĂ©tĂ©roclite, car si lâentreprise fut collective la conception demeura personnelle, La RĂšgle du jeu possĂšde une rigueur interne, en dĂ©pit des retouches et des bavures, qui confirme la maĂźtrise dâun authentique crĂ©ateur allergique Ă toute discipline mais sensible au moindre tropisme, soucieux cette fois dâexprimer totalement sa vision du monde, libre et personnelle. JusquâĂ prendre, par lâintermĂ©diaire dâOctave, un caractĂšre autobiographique surprenant. On peut discuter la valeur du personnage, qui colle trop Ă son interprĂšte, et le jeu dĂ©contractĂ© mais naĂŻvement roublard de celui-ci. Subsiste, derriĂšre cette rondeur faconde, une prĂ©sence Ă©mouvante dont les interventions les plus prolixes font dresser lâoreille. Mais le film tout entier lui ressemble. Les recettes de cuisine, les airs 1900, le moindre objet sont dâabord choisis pour une jubilation intime, comme les courbures de la monumentale Charlotte, les gestes dâun personnage ou ses rĂ©pliques. Les deux thĂšmes majeurs qui courent dans plus de trente films sont ici traitĂ©s fortissimo la nature, le ciel, les arbres et lâeau ; puis les femmes, aussi bien celles dont on baise la main que celles dont on pince la taille. Un des regrets de mon pĂšre fut de nâavoir pu peindre des coins de Sologne. Comme jâai compris la sincĂ©ritĂ© de ses regrets devant ces beaux paysages aux couleurs Ă©tonnantes, dâune grĂące si mĂ©lancolique et si douce Ă la fois, de la Sologne ! » Il avait dit âŠCe que je veux que lâon sente dans ce film, câest mon grand amour pour les femmes. Il faudra pour cela que je montre des hommes ; des hommes qui parlent des femmes, qui diront tout ce quâon peut dire sur elles. » ThĂšmes rĂ©vĂ©lateurs de son tempĂ©rament sensuel et de son goĂ»t de la vie. Chez lui, les mouvements du corps et du cĆur prĂ©cĂšdent ceux de lâesprit. A la pensĂ©e doctrinale, il prĂ©fĂšre lâexpĂ©rience individuelle, le contact direct avec les hommes, ses semblables. Le malentendu sur la signification de La RĂšgle du jeu provient de lĂ on y chercha lâĆuvre dâun partisan quand il fallait y voir celle dâun moraliste. Comme nombre dâintellectuels et dâartistes antifascistes, Jean Renoir avait adhĂ©rĂ© beaucoup plus par gĂ©nĂ©rositĂ© naturelle que par conversion philosophique au Parti communiste. Il restait un bourgeois idĂ©aliste, fonciĂšrement indĂ©pendant, le cĆur Ă gauche, mais Ă la maniĂšre de bien des confrĂšres plutĂŽt fidĂšles au courant anarchisant qui baigne le cinĂ©ma français. Une Ćuvre comme Le Crime de monsieur Lange 1935 marquait prĂ©cisĂ©ment lâadhĂ©sion de ces individualistes au Front Populaire, qui dura le temps des illusions. On aurait pu prendre garde au ton trĂšs significatif de La Grande Illusion dont la presse de droite reconnut le patriotisme Ă©clairĂ© » et le sens des nuances. Certes, le schĂ©ma marxiste est respectĂ© les diffĂ©rences de classes situent les vraies frontiĂšres, mais, si les hommes sont dĂ©terminĂ©s par leur Ă©ducation et leur milieu social, ils le sont tout autant par Ia Nature et le caractĂšre. Ils se retrouvent dans leur diversitĂ©, avant de se grouper selon des affinitĂ©s normales. Au lieu de cingler le junker et le Cyrard, traĂźnant mĂ©tallos et professeurs au carrousel de boue et de sang qui sâachĂšvera par la RĂ©volution dâOctobre, lâancien combattant Ă©coute leurs raisons, nuance leur personnage, tĂąche dâen exprimer la grandeur lucide face Ă la mort de sa race. CrĂ©puscule des dieux. Un Boieldieu aussi a de la classe, et ça se perd ! Bien sĂ»r, La RĂšgle du, jeu a des accents beaucoup plus grinçants. Les allusions sarcastiques ne manquent pas, et prĂ©cisĂ©ment le terrible Alsacien, pendant la guerre, en a tuĂ© pour moins quâça! ». On dĂ©nonce le bourrage de crĂąne radio, presse, publicitĂ©, gouvernement et la stupiditĂ© du racisme. Lâhymne boulangiste claironnĂ© devant lâArc de Triomphe serre le cĆur comme un pressentiment dâhĂ©catombe, que le massacre de la chasse prĂ©figure tragiquement. A travers lâactualitĂ©, se dĂ©veloppe dâautre part une savoureuse mais fĂ©roce critique du monde », dont Octave Renoir connut les arcanes. Il en montre la vanitĂ©, le vide, la futilité⊠Ces ĂȘtres dĂ©cadents ont perdu leurs raisons de vivre, leur force et leur sincĂ©ritĂ©. Ils flottent dans le vĂȘtement dâune tradition qui sauve les apparences. Leur respect de lâĂ©tiquette », le seul dogme qui les justifie, les condamne Ăą lâhypocrisie. Un moment de distraction geste ou sentiment spontanĂ©, provoque le drame. Sâagit-il pour autant dâune condamnation sans pitiĂ© de la bourgeoisie ? Certes non ! Quâon compare avec les accents vengeurs dâun Zola ou dâun CĂ©line⊠Renoir est plus dâune fois complice de ses hĂ©ros â tout le monde a ses raisons » â et ne mĂ©nage pas son estime Ă lâadversaire quand il a la luciditĂ© brillante dâun La Chesnaye la derniĂšre rĂ©plique du film est ambiguĂ«. En fait, nous avons affaire non pas Ă une Ă©tude sociale, mais Ă une critique de mĆurs On aurait tort de chercher un caractĂšre symbolique ou de trouver, dans La RĂšgle du Jeu, des thĂšmes satiriques sociaux. Les personnages sont de simples ĂȘtres humains, ni bons ni mauvais, et chacun dâentre eux est fonction de sa condition, de son milieu, de son passĂ©.» Enfin et surtout, maĂźtres et domestiques sont renvoyĂ©s dos Ă dos le costume, dĂ©guisement social, importe moins que celui qui le porte et les hommes se ressemblent par ce quâils cachent» Paul ValĂ©ry. Les chassĂ©s croisĂ©s des salons aux cuisines rĂ©vĂšlent une identitĂ© de nature entre des ĂȘtres que la sociĂ©tĂ© a diffĂ©remment pourvus. Renoir dĂ©nonce le mensonge, mais lâinjustice ? De quoi vivent ces profiteurs et ces parasites ? Dâun grand industriel du Nord, nous ne tirerons quâune boutade Il pleut dans vos usines ? â Comme partout ! » La vigueur du pamphlet disparaĂźt au profit de lâobservation psychologique des individus tourmentĂ©s par leurs passions. La RĂšgle du jeu situe Renoir dans la lignĂ©e des moralistes français, dâun Chamfort par exemple, dont il partage ici le pessimisme lucide Il nây a pas un personnage de La RĂšgle qui vaille la peine dâĂȘtre sauvĂ©. » [Philippe Esnault â LâAvant-ScĂšne CinĂ©ma,n°52 â octobre 1965] Il se force pourtant Ă rassembler la cohorte bigarrĂ©e des milieux privilĂ©giĂ©s un couple cosmopolite, lâex-juif Rosenthal et son Ă©pouse autrichienne, croise le mĂ©nage provincial des La BruyĂšre, reçoit un sportif cĂ©lĂšbre, flanquĂ© dâun intellectuel bohĂšme, et des dames de lâaristocratie sous les yeux dâun insupportable gandin et dâun gĂ©nĂ©ral en retraite restĂ© trĂšs vert, dâun inverti bien fade et du BrĂ©silien de La Vie parisienne⊠Lâargent seul les lie dont le pouvoir Ă©vident nâest pas contestĂ©. Robert, duquel GeneviĂšve vient de blĂąmer lâinstinct de propriĂ©tĂ©, sâinquiĂšte de la situation de Jurieu qui doit emmener Christine. Quelques instants plus tard, Lisette saura dĂ©courager lâimpĂ©cunieux Octave dâenlever une femme du monde⊠Lâargent surĂ©lĂšve les maĂźtres, dont les serviteurs exigent avant tout quâils aient de la branche » et de la tenue. On les sert religieusement, quâon soit majordome ou garde-chasse ; on les copie le chauffeur se fait appeler La Chesnaye », on les envie Lisette dĂ©vore Christine des yeux, on les estime pour leurs exigences raffinĂ©es la salade de pommes de terre du cuisinier, qui fĂ©licitera Corneille dâavoir maĂźtrisĂ© Schumacher. Marceau lui-mĂȘme, les larmes aux yeux, remerciera Monsieur le Marquis », qui le chasse, de lâavoir relevĂ© en faisant de lui un domestique. Ces ĂȘtres, que les conventions sociales sĂ©parent, se retrouvent dans la nuditĂ© de lâamour, les hommes dâun cĂŽtĂ©, les femmes de lâautre. Lâinstinct rapproche les sexes, mais leur nature est diffĂ©rente leur amitiĂ© nâest pas possible. La violence des mĂąles et leur goĂ»t de la possession heurtent la sensibilitĂ© capricieuse de leurs compagnes, trop avidement courtisĂ©es. Quand lâamour nâest plus un jeu courtois ou JâĂ©change de deux fantaisies, quand le sentiment sâen mĂȘle, le drame de lâincomprĂ©hension commence. Lâinstitution du mariage ne rĂ©soud rien lâĂ©pouse rĂȘve dâavoir un enfant et le mari, son harem. La chasse au bonheur rĂ©vĂšle la nature profonde des personnages â la sincĂ©ritĂ© terrible de Schumacher, Jurieu et Jackie contrastant avec le comportement des autres â et la confidence de leurs aventures provoque des complicitĂ©s familiĂšres Robert-Marceau, Christine et Lisette. Plus gĂ©nĂ©ralement, les individus se groupent par affinitĂ©s, se rencontrent et sâopposent suivant leurs instincts et leurs intĂ©rĂȘts. Quelques couples Robert lâenfant gĂątĂ© et Octave le bohĂšme ; Robert lâhomme du monde et Jurieu le sportif ; Robert et Christine, Robert et GeneviĂšve, ce mari et cet amant quâelles dĂ©couvrent identique ; Robert et Schumacher le maĂźtre et lâesclave; Robert et Marceau lâĂ©cole buissonniĂšre. Faut-il rappeler les pittoresques alliances du gĂ©nĂ©ral et de Saint-Aubin, de Charlotte avec lâinverti ? Ces confrontations successives dessinent le portrait de chacun Christine avec Lisette, Mme La BruyĂšre, Jackie, GeneviĂšve, dĂ©finit son caractĂšre de femme reflĂ©tĂ© dans les yeux du partenaire. Le couple Schumacher-Marceau, le plus Ă©tonnant, prouve assez la force de cet enrichissement rĂ©ciproque. [Philippe Esnault â LâAvant-ScĂšne CinĂ©ma, n°52 â octobre 1965] Personnages, mais aussi marionnettes dont Renoir tire les ficelles, lui qui nâaime pas que la civilisation trahisse la nature. DĂ©risoire et pathĂ©tique, câest un drame gai qui court du vaudeville Ă la tragĂ©die non pas successivement, mais Ă chaque instant, avec cette mĂąle gaietĂ©, si triste et si profonde⊠» quâil rĂȘvait depuis longtemps dâexprimer. Du coup, il a mis tout le monde Ă contribution, sans que lâĆuvre sente jamais la redite ou le plagiat. Et dâabord lui-mĂȘme On pense Ă Boudu Octave, Ă Toni les maçons italiens, au Crime de Monsieur Lange les Indiens, Ă La Grande Illusion Rosenthal ⊠On pense beaucoup au Stroheim de Folies de Femmes, dont il reçut le choc dĂ©cisif, au Buñuel de LâAge dâor quand Modot tire son revolver, aux cocasseries des Marx, Ă la poursuite du Million⊠Mais les influences les plus rĂ©vĂ©latrices sont de nature littĂ©raire. Paulette Dubost et Gaston Modot semblent jouer dĂ©jĂ Le Journal dâune femme de chambre, quâil adaptera. Du naturalisme dâun Mirbeau, dont il sâest Ă©loignĂ©, en passant par le romantisme dâun Musset dont la fantaisie lui plaĂźt davantage que lâeffusion, Renoir parvient Ă trouver un secret accord avec un siĂšcle jumeau du nĂŽtre le XVIIIe. Les astres de ce ciel orageux Ă©clairent sa farandole Marivaux pour le sentiment, Beaumarchais pour la critique sociale, Diderot, Laclos.., tout lâĂ©clat de lâesprit français. Et par-delĂ ces maĂźtres, la Commedia dellâarte, dont les dramaturges ont su garder lâinventive libertĂ© en Ă©mancipant le valet qui, de Scapin, se mĂ©tamorphose en Figaro. La RĂšgle du Jeu annonce lâĂ©volution du crĂ©ateur vers le film-divertissement. Treize ans avant Le Carrosse dâor, il prĂ©sente la vie comme un spectacle, accuse les traits, force le jeu, improvise au-dessus du ton. Sâil reste fidĂšle Ă lâimpressionnisme paternel qui lâenchante, il sâĂ©vade pour toujours du naturalisme au profit dâun rĂ©alisme intĂ©rieur », Ce qui le conduit il retrouver les schĂšmes du théùtre Zola opposait dĂ©jĂ le rĂ©alisme du roman Ă la vĂ©ritĂ© théùtrale. Le paradoxe, câest quâil en profite pour libĂ©rer son cinĂ©ma dâune dramaturgie plaquĂ©e, le jeter dans lâespace et dans le temps. Si bien que la dynamique du film, fondĂ©e sur le rythme des intrigues parallĂšles, celles des maĂźtres autour de Christine, celles des valets autour de Lisette, jusquâĂ leur convergence finale, rĂ©vĂšle une conception spatio-temporelle qui marque le passage dans le langage cinĂ©matographique de la construction théùtrale Ă lâĂ©criture romanesque. [Philippe Esnault â LâAvant-ScĂšne CinĂ©ma, n°52 â octobre 1965] La premiĂšre partie, parisienne, est justement critiquĂ©e comme trop conventionnelle. Lâexposition scĂšnes chez La Chesnaye et chez GeneviĂšve, sĂ©quence de lâinvitation dâAndrĂ© Jurieu est beaucoup trop longue â vieux drame du cinĂ©ma français ! â les effets trop appuyĂ©s, la rĂ©alisation banale. Quant aux sĂ©quences du Bourget et de laccident, elles manquent pour le moins de punch. Reste un montage adroit, de type temporel-causal. Le film dĂ©bute vraiment par lâadmirable plan panoramique de lâarrivĂ©e des voitures de maĂźtres au perron du chĂąteau. DĂšs lors, le ton monte. Si la temporalitĂ© reste confuse, le mouvement de la vie prend grande allure. La partie de chasse est une page dâanthologie, par sa beautĂ©, qui rappelle celle dâUne Partie de campagne, et sa signification complexe. Câest dâabord un tableau documentaire poĂ©tique et tragique. Quand il voit les rabatteurs en blouse blanche, au coup de trompe de Schumacher, donner du bĂąton contre les troncs blancs de cette forĂȘt ourlĂ©e de terre plate qui prennent un Ă©clat de mĂ©tal sous un ciel plombĂ© de Toussaint, quand il les voit sâavancer inexorablement en poussant des cris pour lever le gibier apeurĂ© quâon guide vers lâaffĂ»t des chasseurs qui les massacrent sadiquement, le spectateur, mĂ©dusĂ©, se dĂ©couvre lâimpuissant tĂ©moin dâun forfait. Sa valeur psychologique et symbolique nâest pas moindre puisque cette chasse des invitĂ©s paraphrase Ă lâavance le meurtre du plus noble dâentre eux Il a boulĂ© comme un lapin Ă la chasse » et transfĂšre Ă la maniĂšre dâune fable lâhorreur guerriĂšre, dont la gratuitĂ© paraĂźt moins immĂ©diate. Le spectacle par lequel dĂ©bute la fĂȘte au chĂąteau a finalement le mĂȘme caractĂšre symbolique cette miteuse revue de fin dâannĂ©e exprime la mĂ©diocritĂ© Nous avons lâvĂ© Iâpied », lâinconscience Gais et contents » et la vague peur La Danse macabre » de ces beaux esprits. Au son du piano solo, on sâenfonce dans lâirrĂ©alisme pour dĂ©boucher sur le rĂȘve Schumacher surgit comme un justicier incongru dont il faut se dĂ©barrasser, tandis que le limonaire dĂ©traquĂ© continue sa ritournelle. La sarabande des pantins sâaccĂ©lĂšre au rythme des deux poursuites qui se croisent. Le coup de feu dans le parc marque le rĂ©veil Ă la vie. Tout peut rentrer dans lâordre le garde-chasse a dĂ©barrassĂ© le patron de son rival. [Philippe Esnault â LâAvant-ScĂšne CinĂ©ma, n°52 â octobre 1965] Renoir se dĂ©double laissant Ă Octave le soin dâintervenir pour lui dans la mascarade, il scrute du regard, en tant quâauteur, ce spectacle complexe dont il a mĂ©nagĂ© les mouvements et le cadre par rapport Ă nous, spectateurs agis. Est-ce le souvenir des dĂ©placements fĂ©lins de la camĂ©ra de Stroheim sur les monstres de Monte-Carlo ? Est-ce la conscience dâune Ă©volution dĂ©cisive qui entraĂźnera Welles, Hitchcock et Dreyer ? Est-ce la rĂ©ponse naturelle au besoin du moment ? Toujours est-il que Jean Renoir opte dĂ©libĂ©rĂ©ment pour la profondeur de champ, dont AndrĂ© Bazin dit toute lâimportance. La RĂšgle du jeu est un film trĂšs peu dĂ©coupĂ© puisquâil compte trois cent trente-six plans au long de ses trois mille mĂštres ; encore faut-il prĂ©ciser que la sixiĂšme bobine â celle de la chasse â comporte dĂ©jĂ cinquante-sept numĂ©ros. Le procĂ©dĂ© lui permet dâobtenir un rendu plus fidĂšle et plus intense des actions divergentes ou parallĂšles quâil dĂ©veloppe en profondeur ou latĂ©ralement dans lâĂ©tendue du cadre. Par des enchaĂźnements horizontaux de travellings et de panoramiques â que nâa-t-il une grue ! â il en suit la course comme un enquĂȘteur. La camĂ©ra qui traque Schumacher, Ă la recherche de Lisette-Marceau, dâune porte Ă lâautre du grand salon, oĂč lâon mime dans la pĂ©nombre le morceau de Saint-SaĂ«ns, se fixe comme un regard sur le visage dĂ©composĂ© dâAndrĂ©, lorgnant une Christine pitoyablement jetĂ©e sur un canapĂ© dans les bras de Saint-Aubin. VoilĂ du grand cinĂ©ma. [Philippe Esnault â LâAvant-ScĂšne CinĂ©ma, n°52 â octobre 1965] Il est plus commode de parler du naturel de la vie que de le restituer. Et lorsque Renoir dĂ©clare Câest Ă partir de La RĂšgle du Jeu que je me suis aperçu que la technique nâavait pas dâimportance », il faut plutĂŽt comprendre que tout lâart est de la faire oublier. Car il est bien difficile, par exemple, de saisir dans tout ce brouhaha les conversations et les bruits, mĂȘme lors de ces prĂ©cieux temps morts » qui rompaient avec le style coutumier dâefficacitĂ© toujours intentionnelle. Jâavais dĂ©jĂ Jo de Bretagne au son avec moi. Nous employĂąmes six bandes sonores au lieu dâune⊠» Prouesse pour lâĂ©poque que la prise en direct des sons purs de la chasse, que celte savante confusion sonore du hall et des couloirs, que ces effets de distance et ces mĂ©langes adroits. Mais il faut insister plutĂŽt sur le dialogue. Sauf quelques ratages conversation chez GeneviĂšve, verbositĂ© dâOctave il est merveilleux de justesse. Pour une fois, les rĂ©pliques savoureuses Ă la PrĂ©vert et les passages littĂ©raires ne dĂ©truisent pas dans un film français lâauthenticitĂ© des Ă©changes quotidiens. Un style pour les domestiques, plus respectueux et plus familier, un style pour les maĂźtres, plus brillant et dĂ©sinvolte Le ton du monde consiste beaucoup Ă parler des bagatelles comme des choses sĂ©rieuses, et des choses sĂ©rieuses comme des bagatelles. Montesquieu. » Dans lâemploi dâun riche vocabulaire, parfaitement datĂ© Ăa y est, y en a un qui a Ă©touffĂ© mon chapeau ! » on notera la rĂ©vĂ©latrice dĂ©valuation des mots dans la bouche de La Chesnaye dangereux, affreux, admirablement ⊠et le respect du style de chacun le gĂ©nĂ©ral et Berthelin pour la poule dâeau, servi par lâexpression vocale Ă lâaccent germanique de Christine rĂ©pond la verve parigote dâOctave et de Marceau, maniaques de lâĂ©lision. Dans les tournures les ellipses abondent Enfin, ont-ils ou nâont-ils pas ? â Ils ont ! » Et, pour la premiĂšre fois peut-ĂȘtre, le geste se joint Ă la parole pour en achever le sens passage devant Christine de Lisette et Marceau, poursuivis par Schumacher. Enfin, câest un coup de gĂ©nie que dâavoir prĂ©fĂ©rĂ© Ă lâhabituel commentaire musical au mĂštre des airs 1900 cocasses et des extraits de classiques racĂ©s. La mĂ©lancolie de Mozart enveloppe comme un suaire ce monde distinguĂ© au bord de la fosse. [Philippe Esnault â LâAvant-ScĂšne CinĂ©ma, n°52 â octobre 1965] En crĂ©ateur libre, Jean Renoir qui nâaime guĂšre la technique », refuse la rĂšgle du jeu professionnel, et ses fautes de grammaire » sont de remarquables trouvailles je franchis la fameuse ligne de dĂ©marcation des 180 degrĂ©s, je fais des panos en ciseau », je raccorde brutalement dans lâaxe⊠Les gros plans sont rares, rĂ©servĂ©s aux effets dramatiques GeneviĂšve, Octave comme lâinsertion de plans fixes dans la continuitĂ© la chasse. Les cadrages trichent toujours un peu avec la norme et prennent les acteurs plutĂŽt de biais, mais en Ă©liminant le plus possible le fastidieux champ-contrechamp Plus ça va, plus je renonce aux confrontations entre deux acteurs placĂ©s sagement devant lâappareil chez le photographe. Cela mâest commode de placer plus librement mes personnages Ă des distances diffĂ©rentes de la camĂ©ra, de les faire bouger ⊠1938 » Le montage, nerveux, qui procĂšde logiquement et chronologiquement tout Ă la fois par le jeu des causes et des effets, soutient le parallĂ©lisme de la construction et souligne les intentions par dâheureuses ellipses, tout en sauvegardant la fluiditĂ© du rĂ©cit par le recours aux enjambements sonores dâun plan sur lâautre. [Philippe Esnault â LâAvant-ScĂšne CinĂ©ma,n°52 â octobre 1965] Telle est donc cette RĂšgle du jeu, sifflĂ©e probablement plus Ă IĂ©poque pour ses innovations formelles que pour ses audaces de contenu. Les spectateurs dâaujourdâhui, facilement blasĂ©s, sont moins sensibles Ă celles-ci quâĂ celles-lĂ . Les sĂ©duit dâabord lâaccent personnel dâun cinĂ©aste de grand talent qui se livre sans dĂ©tours dans une Ćuvre pleine Ă craquer qui reste le modĂšle cinĂ©matographique de lâart et de lâesprit français, fruit dâune culture jardiniĂšre conduite pendant des siĂšcles. Les ouvrages postĂ©rieurs de Renoir, qui prĂ©tendent en dĂ©velopper les leçons, sont plus dâune fois le reflet nostalgique de cet Ă©clatant feu dâartifice. Mais comme, dans le cinĂ©ma, on copie tous un peu sur les autres » Marcel CarnĂ© dixit, plus dâun confrĂšre, mĂȘme Ă©tranger, lui devra quelque chose. En considĂ©rant certains grands films de loccupation, de LumiĂšre dâĂ©tĂ© aux Enfants du Paradis en passant par Douce, on ne peut pas ne pas songer Ă la cruelle mascarade de La RĂšgle du jeu. Et qui dira la dette de la nouvelle vague », dâun Kast ou dâun Doniol-Valcroze, Ă lâĂ©gard de son pĂšre ? Qui dira ce que les auteurs de Senso, de La Dolce Vita, de La Notte peut-ĂȘtre ont tirĂ© de lui ? Influence ou rencontre, il nâest pas jusquâaux Sourires dâune nuit dâĂ©tĂ© suĂ©doise qui nâĂ©voque le jeu capricieux de La RĂšgle⊠Pardonnez-moi, quand je me suis plantĂ© devant Les Massacres de Rambouillet du peintre Lorjou, quand LĂ©o FerrĂ© mâa fredonnĂ© âŠDeux ou trois coups pour le faisan et le reste pour lâamazone », des images chĂšres me sont naturellement venues Ă lâesprit celle dâun petit lapin qui tend les pattes dans son agonie, le visage baignĂ© de larmes de Schumacher et, sur un fond dâairs de fĂȘte, les rĂ©plique que nous Ă©changions entre amis sur les bancs de bois oĂč nous usions nos premiĂšres culottes de cinĂ©philes Il faut bien que ces gens-lĂ sâamusent comme les autres ! » â Nous quitterons le chĂąteau en pleurant cet ami exquis.» â Vous mâdirez câque vous voudrez, mais ça, câest un homme du monde! » â Je nâai pas de vieille mĂšre ? Moi, je nâai pas de vieille mĂšre ?⊠» VoilĂ sans doute le film français sonore le plus important, sâil nâest pas le plus rĂ©ussi ses imperfections dues Ă lâexcĂšs dâimprovisation, sa richesse excessive qui laisse parfois perplexe, autant de maladresses qui sont la rançon dâune recherche alerte qui ne finit pas de sĂ©duire et dâĂ©tonner. Comment, par exemple, lui prĂ©fĂ©rer la sagesse acadĂ©mique de La Grande illusion ? Ce que Jean Renoir pouvait rĂ©pondre de mieux Ă RenĂ© Clair, câest quâil est moins urgent de rĂ©ussir des films que dâinventer le cinĂ©ma. [Philippe Esnault â LâAvant-ScĂšne CinĂ©ma, n°52 â octobre 1965] A lire Ă©galement â LA RĂGLE DU JEU â Jean Renoir 1939 Devenu culte aprĂšs avoir Ă©tĂ© maudit mutilĂ©, censurĂ©âŠ, ce vaudeville acide a Ă©tĂ© conçu dans lâatmosphĂšre trouble prĂ©cĂ©dant la Seconde Guerre mondiale, Ă une Ă©poque oĂč une partie de la sociĂ©tĂ© française ignorait quâelle dansait sur un volcan. Jean Renoir sâinspire de Beaumarchais et de Musset. Et il dirige ses comĂ©diens, inoubliables, en pensant Ă la frĂ©nĂ©sie de la musique baroque, Ă la verve trĂ©pidante de la commedia dellâarte Dalio en aristo frimeur, Carette en braconnier gouailleur, Paulette Dubost en soubrette, Gaston Modot en garde-chasse crucifiĂ©. Cette comĂ©die-mascarade entre bourgeois et domestiques est empreinte de gravitĂ©, Ă lâimage de la partie de chasse, macabre prĂ©moniÂtion dâun massacre. Renoir le moraliste y dĂ©veloppe son thĂšme de prĂ©dilection le monde est un théùtre, la sociĂ©tĂ© un spectacle, et chacun a ses raisons de changer de rĂŽle, dâabuser des rĂšgles du jeu. [Nagel Miller â TĂ©lĂ©rama]